samedi 23 octobre 2010

une communauté de parties prenantes?

Les parties prenantes d'une entreprise peuvent-elles être vues comme formant une "communauté" au sens de ce que les community managers ont pour tâche de "gérer"? La difficulté essentielle vient du fait que les parties prenantes sont pour beaucoup des organisations. Or, je tiens pour acquis qu'une organisation n'est pas réductible à la somme de ses membres. Cela signifie qu'une communauté de parties prenantes ne serait pas, bien entendu, simplement la communauté des représentants des organisations en question, mais qu'elle ne serait pas non plus la communauté des membres de ces organisations. Ce serait une communauté ayant comme membres des organisations (entreprises, syndicats, associations, collectivités, ...) et des individus (par exemple, les riverains - ou leurs représentants).

Donc s'il avait, dans le concept de communauté lui-même, des restrictions sur la nature de ce qui peut former une communauté, l'idée que les parties prenantes forment une communauté serait peu crédible. Mais il me semble que rien n'interdit de concevoir une communauté composée d'organisations plutôt que d'individus, ou d'organisations et d'individus mélangés, si les membres remplissent de facto les conditions requises (cf mon billet sur les critères de la communauté et tous les articles plus "sérieux" qui existent sur le sujet.)

De plus, ce qui caractérise fondamentalement une communauté par rapport à une coalition, c'est la spontanéité (l'absence de calcul et d'objectif stratégique). Or, de ce point de vue, l'ensemble des parties prenantes ressemble beaucoup plus à une communauté qu'à une coalition. Chaque partie prenante poursuit en effet son intérêt propre sans (trop) se préoccuper des autres et les parties prenantes ne sont "soudées" entre elles que par la force de liens hétérogènes et disparates : commerciaux, juridiques, idéologiques, ... En résumé : par ce fait quasi-accidentel qu'elles sont les parties prenantes de la même entreprise. (A comparer avec : les admirateurs du même artiste, les fans de la même marque, les membres du même club d'échecs, etc.)

Tout ceci suggère qu'on peut concevoir utilement les parties prenantes comme une communauté. C'est d'ailleurs ce que pensent, pour des raisons plus théoriques, certains chercheurs en éthique des affaires (par exemple Buchholz & Rosenthal, 2005). A partir de là se pose une nouvelle question : est-ce qu'on peut piloter (niveau stratégique) et animer (niveau opérationnel) une communauté de parties prenantes comme une communauté d'individus? Rien n'interdit de le penser, me semble-t-il. Pour piloter les échanges entre l'entreprise et ses parties prenantes, il suffirait donc d'adapter les outils de pilotage consacrés aux communautés. Enfin, bien sûr, c'est ce qu'il suffirait faire si de tels outils existaient...

1 commentaire:

  1. Alain Anquetil - alain.anquetil@essca.fr24 février 2011 à 08:53

    La question est toutefois de savoir ce que l'on peut faire pratiquement d'une communauté définie comme un ensemble d'agents unis par des liens disparates. La définition manque peut-être de l'épaisseur nécessaire pour qu'elle permette un usage empirique. A supposer qu'elle soit adoptée pour faire évoluer des outils de management, elle risque même, dans la pratique, de déboucher sur une vision individualiste et au cas par cas des relations entre la firme et ses parties prenantes. Ce qui serait contradictoire.

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